dimanche 29 mars 2015

Crash de l’Airbus A320 de Germanwings (1)


Un jour, je vais faire quelque chose qui va changer tout le système, et tout le monde connaîtra mon nom et s’en souviendra." Propos confié par Andreas Lubitz à son ancienne petite amie, une hôtesse de l’air, d'expliquer au Bild « S’il a fait ça, c’est parce qu’il a compris qu’à cause de ses problèmes de santé, son grand rêve d’un emploi à la Lufthansa, comme capitaine et comme pilote de long courrier était pratiquement impossible. »

Il existe moult risques liés à l'usage de l'avion et un comportement anormal d'un passager ou du personnel navigant n’est jamais totalement à exclure. Le 1e juillet 2002, soixante et onze passagers sont morts à la suite d’une collision en vol entre un Tupolev et un Boeing au dessus d’Überlingen. Au moment du crash, les membres d’équipage du Tupolev se disputaient dans le cockpit à propos de l'interprétation des instructions transmises par les contrôleurs aériens ! Un avion d’Air India parti de Dubaï rate sa destination. Les pilotes s’étaient endormis aux commandes ! En Grèce (septembre 2008), c’est le contrôleur du trafic qui dormait. Le 19 décembre 1997, un Boeing assurant la liaison Singapour – Jakarta s’écrase sur l’île de Sumatra, la compagnie a reconnu que le suicide du pilote était une cause possible de l’accident. Un appareil appartenant à la compagnie d’America Airlines assurant la liaison entre Tokyo et Dallas a dû atterrir en urgence à Honolulu à cause d’un écureuil dans le plafond, le pilote craignant que l’animal grignote des câbles ! L’appareil transportant le premier Ministre des affaires étrangères du Danemark a dû, le 21 novembre 2008, faire un atterrissage forcé. Le heurt avec des volatils avait fissuré la vitre du cockpit. Le 4 juin 2008, un F/A-18 a failli percuter lors d’un exercice, un avion d’affaires espagnol au-dessus de Genève (s'il devient difficile de détourner un appareil commercial, cela n'est pas le cas pour les appareils d'affaires) ! La liste est loin d’être exhaustive.

La connaissance des grands moments qui contribuent à tout déplacement aérien permet de mieux appréhender les risques susceptibles de survenance à un moment quelconque du déplacement. Un passager averti sera en mesure de repérer ce qui ne cadre pas avec la routine du quotidien d'un aéroport ou du bon déroulement d'un vol. Le passager doit être conscient qu'emprunter certaines compagnies peut en certaines circonstances représenter un facteur aggravant, ce risque est d'autant plus à redouter que certaines compagnies s'identifient avec un pays en particulier... Savez-vous que certains appareils de lignes passagers transportent des valeurs : métaux précieux, gemmes, fonds, etc., de nature à venir constituer un facteur aggravant supplémentaire ?

Pour comprendre les problèmes spécifiques liés à chaque étape d'un voyage aérien, des connaissances élémentaires réduites à leur portion congrue sont indispensables.  Dès que l'avion se pose sur le tarmac, il est immédiatement pris en charge par le personnel au sol et les dernières formalités pour l'embarquement peuvent commencer. Simultanément, les employés s'activent à la préparation de l'appareil. Le mécanicien procède au « transit check » qui consiste en un controlatéral visuel de l'empennage, du bord d'attaque des ailes pour s'assurer qu'ils n'ont pas été endommagés par une collision avec un objet, un oiseau, un morceau de glace, que les pneus et freins sont en parfait état et que l'appareil ne présente aucune trace de fuite. D'autres employés approchent la passerelle télescopique ou une échelle motorisée. Un autre employé se charge de la vidange des W-C chimiques pendant que le personnel de nettoyage s'affaire à l'intérieur de l'appareil, tandis qu’un autre fait le ravitaillement en eau potable et que l'on procède au chargement du fret et des bagages.

La livraison des repas se fait par conteneur de ravitaillement, (une heure avant le départ pour les longs courriers et dix minutes sur les courts courriers). Le 17 juillet 2012, des aiguilles à coudre ont été découvertes dans des sandwiches préparés par l'un des plus importants prestataires de service des compagnies aériennes, à bord de quatre avions de la compagnie Delta Air Lines partis d'Amsterdam à destination des États-Unis. Une personne a été blessée.

Un employé au sol s'occupe de faire le plein en carburant. Sur les petits aéroports, le ravitaillement se fait via un camion citerne pourvu d'une pompe, mais sur les grands aéroports, les soutes sont enfouies sous le tarmac. C'est à partir d'un poste distributeur et d'un engin de pompage qu'on procède au transfert du kérosène en provenance des cuves noyées dans le sol. L'ensemble de ces opérations peut se dérouler sous la responsabilité du chef d'escale.

Septembre 2004, un journaliste qui avait revêtu un costume ressemblant à celui des stewards, a réussi à pénétrer à plusieurs reprises sur le tarmac, à monter à bord de deux avions et à s’approcher des soutes sans qu’on ne le remarque. Il lui a suffi pour s’introduire sur les pistes, de suivre un équipage et de présenter à sa suite un abonnement de transport en guise de laisser passer ! Pour votre information, un audit (2004) portant sur quatre vingt neuf aéroports canadiens a révélé que plus de 1000 uniformes ou parties d’uniformes étaient perdus ou volés et que près de 100 badges de sécurité avaient disparu en moins de neuf mois !

L'appareil préparé, le personnel de cabine (flight attendants) : hôtesses, stewards et un maître de cabine, sur les longs courriers, soit pas moins de 14 personnes sur un Jumbo, peut à son tour rejoindre l'appareil. Il procède à la vérification de la propreté et des installations de sécurité : extincteurs, masques à oxygène (bloc de 120 litres), cagoule anti-feu, rampes d'évacuation, canots pneumatiques, balise radio, fonctionnement des portes et s'assure de la présence des repas livrés par le service hôtelier.

Le passager en partance se rend au guichet d'enregistrement de la compagnie pour y retirer son "boarding pass" ou carte d'embarquement (Air France a lancé en septembre 2008 la carte d’embarquement électronique sur téléphone cellulaire. Les passagers à destination de certains aéroports peuvent accéder à l’avion sans autre document papier qu’un simple document d’identité. Le texto (SMS) reçu est à présenter à l’embarquement). L'employé s'assure de la validité du titre de transport, pèse et étiquette les bagages qui selon leurs dimensions voyageront en soute ou en cabine. Le bagage porteur d'une étiquette à code barre est enregistré dans l'ordinateur pour permettre le calcul de la masse au décollage (loadsheet), il est ensuite placé sur la bande transporteuse (circulation à l'air libre ou souterraine) pour être chargé en soute. Sur certains vols, les bagages peuvent faire l'objet d'une recherche d'explosifs ou de drogue de la part d’équipes cynophiles. Les bagages sont ensuite placés sur un chariot avant de rejoindre l'appareil sur le tarmac pour être chargés en soute par le personnel d'exploitation.

Une gaffe n’est jamais à exclure. En avril 2006, la sûreté aérienne serbe a égaré des explosifs lors d’un entraînement à l’aéroport de Belgrade. Ceux-ci ont été retrouvés à Skopie, capitale de Macédoine. En décembre de la même année, deux gendarmes appartenant à une équipe cynophile ont glissé lors d’un exercice, une charge d’explosif (sans le détonateur) dans la poche d’une petite valise de couleur bleue. Dix secondes d’inattention ont suffi, le bagage avait disparu sur le tapis roulant de l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle ! Toutes les compagnies concernées, soit environ 80 vols (Italie, Japon, Brésil, USA, France), ont été aussitôt informées de l’incident. Des passagers ont été débarqués, l’appareil fouillé, ce qui a occasionné un retard de trois heures, en vain. Le bagage recherché n’a jamais été retrouvé. En cas d'alerte "à la bombe", chaque passager doit identifier formellement son ou ses bagages avant leur embarquement. Sur certains vols avec escales, les bagages sont placés dans un conteneur. Ce dernier n'est pas conçu pour résister à l'explosion d'un bagage contenu à l'intérieur. Lors de l'attentat de Lockerbie, il a suffi d'un kilogramme d'explosif dissimulé dans un poste radio placé dans une valise elle même placée dans le conteneur pour entraîner l'explosion en vol de l'appareil.

La place attribuée, la carte d'embarquement lui est alors délivrée. La couleur de la carte indique la classe : rouge pour « First class », bleue pour les « business » et verte pour l’«economic ». La carte mentionne : le nom du passager, la place, le numéro du vol, la destination. Ces formalités accomplies, le passager peut se rendre en salle de transit. Il doit auparavant franchir le contrôle douanier, les portiques détecteurs d'objets métalliques, déposer ses bagages cabine sur la bande de transport de la machine à radiographier. Pour certains vols, il est possible d’avoir encore à subir un dernier contrôle manuel par un agent équipé d'un détecteur de métaux portatifs. Seuls les passagers munis de leur carte d'embarquement peuvent se rendre en salle de transit et y procéder à des achats détaxés (duty free).

PRÉPARATIFS AU DÉCOLLAGE : pendant que le personnel naviguant est occupé dans l'appareil et que les passagers attendent d'embarquer, le pilote et le copilote passent au dispatching pour prendre connaissance de la météo et déposer leur plan de vol qui est fonction du nombre de passagers et du fret, informations indispensables pour calculer la quantité de carburant nécessaire au voyage. Le commandant en profite pour consulter les " notam " (notification to airmen) qui sont des informations spéciales : piste fermée, travaux en cours, manœuvre militaire dans l'espace aérien, bref tout ce qui peut avoir une incidence sur le bon déroulement du vol.

Le plan de vol fournit des informations sur la vitesse et la direction des vents, la température, l'altitude et la vitesse de croisière, la quantité de carburant emporté, la durée du vol, les fréquences radio, les points survolés, les distances et durée de vol entre ces points etc. (Il est question pour les pilotes Autrichiens et Suisses qu’ils puissent consulter les donnéesnécessaires au vol à partir de chez eux sur leur ordinateur personnel (home briefing) et ensuite communiquer leur plan de vol directement gare ! aux risques de piratage. Le plan de vol est ensuite transmis au centre de contrôle aérien pour son approbation et être transmis à la station chargée de la surveillance. Le commandant doit également signer la fiche de contrôle de l'appareil et de la conformité de la répartition des charges, sans oublier la nature du carburant qui a été chargé.

Le "dispatch" est habilité à modifier le plan de vol en présence d'impératifs : météo, fermeture soudaine d'une piste, grève, panne d'instrument, incident, alerte à la bombe, détournement, escale imprévue pour embarquer des passagers délaissés par un autre appareil, etc. Le plan de vol "accepté" par l'ordinateur de contrôle de route, le vol reçoit un " strip " qui mentionne : la compagnie, le N° du vol, le type d'appareil, le N° de fichier, l'heure de départ et d'arrivée en TU (temps universel), la provenance, l'itinéraire, les balises, l'altitude, etc., informations qui vont être transmises tour à tour à chaque centre de contrôle placé sur la route de l'appareil. Après approbation du centre de contrôle, la tour se doit de donner l'autorisation de décollage. Il existe deux catégories de contrôles aériens, celui chargé de la surveillance du trafic de l'aéroport et de ses abords, et celui qui a en charge la circulation dans un espace aérien déterminé.

Le commandant de bord assisté du copilote peut à son tour rejoindre le poste de pilotage pour procéder aux très nombreux contrôles indispensables et obligatoires propres à chaque appareil. Chaque point de contrôle est annoncé, soit par le commandant, le copilote ou l'ingénieur mécanicien (qui tend à disparaître) et pointé sur la liste. Pour chaque type d'appareil existe une liste indiquant quels instruments, système, équipement minima sont requis pour assurer la sécurité du vol. C'est donc la dernière étape pour déceler un incident ou demander le remplacement d'une pièce. Pendant cette phase, il est demandé aux passagers de relever leur siège ainsi que leur tablette et de boucler leur ceinture. Cette vérification terminée, le commandant peut alors demander à la tour de contrôle l'autorisation de mise en marche des réacteurs, mais seulement l'un après l'autre.
Toutes les vérifications terminées, l'embarquement peut commencer. Une annonce en anglais, dans la langue locale, et dans la langue de destination de l'appareil, invite les passagers à se présenter pour l'embarquement. Le personnel qui assiste à l'embarquement des passagers, a assisté au préalable à une séance d'information portant sur les personnes faisant l'objet d'un avis de recherche. En cas d'incident, il doit participer aux premiers secours, à la lutte incendie, et à l'évacuation des passagers.

Si un passager est en retard, le SCC (station control center) peut demander à la dernière minute au commandant d'attendre le passager. Quand tout le monde est à bord, une hôtesse ferme et verrouille la porte sous le contrôle d'un autre membre de PN, tandis que l'escalier ou couloir est éloigné de l'appareil. Une fois à bord de l’appareil, un passager ne peut en descendre. Si un passager a oublié un bagage en salle d’embarquement, l’hôtesse demande à un membre du personnel d’aller le récupérer. Cette procédure, bien compréhensible, peut présenter un risque : des survivants au crash du MD-82 de la Spanair en août 2008 sur l’aéroport de Madrid, qui a fait 154 morts, ont déclaré que les passagers qui avaient demandé à sortir de l’avion lorsqu’il était revenu au terminal pour un problème technique, s’étaient vus refuser de quitter l’appareil. Le mois suivant, les passagers d’un vol de la compagnie Air Berlin ont rédigé une pétition pour exiger de quitter l’appareil après qu’il eut effectué deux tentatives de décollage avortées. Ils ont obtenu gain de cause et ont été redirigés sur un autre vol.


A SUIVRE : EN VOL (2)