samedi 14 novembre 2015

     DE LA PERSE À L'IRAN 


Le 1° décembre 1943, Churchill, Roosevelt et Staline s'engageaient à respecter l'indépendance ainsi que l'intégrité territoriale de l'Iran occupée depuis avril 41 par les troupes britanniques et soviétiques, dans le but d'assurer la protection de leurs transports. Le 16 novembre 45, une insurrection armée éclatait en Azerbaïdjan et le 12 décembre, un gouvernement communiste était constitué. Le chef de gouvernement déclara son intention d'étendre le régime à toutes les démocraties populaires et à l'Iran. Les Américains renforcèrent aussitôt leurs effectifs afin de faire échec aux ambitions de l'URSS qui avait déjà fomenté une rébellion contre Téhéran. L'occupation de l'Azerbaïdjan, pays situé aux marches de l'Irak et de l'Inde, représentait pour Moscou une place prééminente au Proche-Orient. Les Soviétiques firent savoir que leurs unités militaires resteraient stationnées en Azerbaïdjan et au Kurdistan Iranien jusqu'au retour au calme. Le président Truman décidé à ne pas s'en laisser compter adressa un ultimatum à l'URSS lui enjoignant de quitter le territoire Perse sans délai. Le 8 mai, les troupes soviétiques se retiraient et trois mois plus tard, l'Iran signait avec les États-Unis un traité d'assistance militaire. Le 5 février 49, le parti communiste (le Toudeh) était interdit en réponse à une tentative d'attentat contre le Shah.

Le 31 août 1907, les Anglais et les Russes se partageaient la Perse. La convention anglo-russe divisait la Perse en deux zones d'influence séparée par une zone neutre. Pendant la Première mondiale, la Perse devint un champ de bataille pour les Anglais, les Russes, les Turcs, et l'Anglo-Persian Oil Company devint une ? d'une importance vitale. Au sortir de la guerre, la Perse se trouva plongée dans le chaos, ses caisses étaient vides et la famine sévissait. Le Congrès des communistes musulmans, Moscou 1919, estima que la Perse était la plus apte à voir l'expansion des partis communistes locaux. Le 4 juin 1920, la République socialiste soviétique de Gilan était proclamée et avec elle la création du Parti communiste de Perse. L'aventure ne dura qu'une seule année. Les Soviétiques émirent l'idée que la Perse n'était pas préparée pour une "révolution bourgeoise." La Perse était passée d'une société islamique à une monarchie constitutionnelle en 1906, mais c'est par un coup d'État (21 février 1921) portant le Shah Reza Pahlavi sur le trône, que la Perse traditionnelle muta en l'Iran moderne.

Le Shah désireux de libérer l'Iran de toutes les influences économiques étrangères se tourna vers les États-Unis pour lancer un programme de modernisation. Les pays occidentaux étaient surtout haïs en raison des capitulations, privilèges d'extraterritorialité accordés aux étrangers résidant en Iran. La capitulation abolie le 10 mai 1928, de nouveaux traités furent conclus avec : l'Autriche, la Belgique, la France, la Grande-Bretagne, l'Italie, les Pays-bas, la Suède, la Tchécoslovaquie. L'Iran en profita pour revendiquer l'île de Bahreïn alors protectorat anglais... L'année précédente, l'URSS avait annulé tous les traités conclus par le Tsar et supprimé les dettes contractées par la Perse. Parmi les réformes qu'apporta le régime du Shah : l'instruction & des cours du soir pour adultes inspirés des écoles européennes, le système juridique fut soustrait à l'autorité religieuse au bénéfice des juridictions civiles et laïques. Ces mesures allaient entraîner une mutation et un bouleversement de la société.

L'URSS conservait la main mise sur l'Iran qui était obligé de lui vendre ses matières premières avant de les lui racheter sous forme de produits transformés ou de les échanger contre d'autres marchandises. Dans les années trente, le commerce de l'Iran réservé à l'URSS représentait un tiers des échanges. En 1938, le Shah ordonna l'interruption de ces échanges et se tourna vers l'Allemagne, puissance qui n'était jamais intervenue dans les affaires perses.. Cette dernière mit à disposition son assistance technique dans quasiment tous les secteurs industriels iraniens. Lufthansa inaugura la liaison Berlin-Bagdad-Téhéran. Le 25 août 1941, les armées britanniques et soviétiques envahirent l'Iran et prirent le contrôle du chemin de fer transiranien. Le Shah abdiqua au profit de son fils au mois de septembre. Les alliés conclurent le Traité d'alliance tripartite le 29 janvier 42 au terme duquel ils s'engageaient à se retirer dans les six mois après la fin des hostilités. Le 15 décembre 45, la révolte kurde éclatait, poussée par l'URSS. En 47, les États-Unis s'engagèrent à assurer l'indépendance iranienne (doctrine Truman).

Le ciel commença par s'assombrir à partir de l'année 1951 avec la nationalisation du pétrole iranien et l'éviction de l'Anglo-Iranian Oil Company (AIOC), les plus grandes raffineries au monde, installées à Abadan sur le golfe persique. Des grèves et l'agitation nationaliste contraignirent le gouvernement à proclamer l'état de siège dans l'État du Khouzistan. Le président du conseil, le général Razmara, fit remarquer que l'Iran ne disposait pas des moyens techniques suffisants pour exploiter lui même les régions pétrolifères. Le 7 mars, il était assassiné par un membre des "frères de l'islam". Le 10 juin, le leader du parti nationaliste, le Dr Mossadegh qui avait succédé au général Razmara, faisait hisser le drapeau iranien sur le siège social de l'AIOC situé à Khoramshan. Le 3 octobre, les Anglais qui avaient refusé à l'unanimité de travailler sous les ordres de la nouvelle entité, quittaient la zone sans incident. L'Iran exigea la fermeture de tous les consulats sous prétexte qu'en outrepassant leurs compétences, ils intervenaient dans les affaires intérieures iraniennes. Le 16 octobre, le Dr Mossadegh rompait les relations diplomatiques avec la Grande-Bretagne.

Au mois de juillet, le mollah Kashani souleva la foule contre Mossadegh en soutien au Shah Reza Pahlevi. Mossadegh évincé, se rapprocha du parti communiste iranien avant d'être arrêté le 19 août par l'armée et condamné à 3 ans d'emprisonnement. La Grande-Bretagne et l'Iran rétablirent leurs relations diplomatiques. L'exploitation pétrolière fut accordée pour une durée de 25 ans à un Consortium constitué des sociétés : anglo-iranian (40%), Shell (14%), cinq compagnies américaines (40%) et la Compagnie française des pétroles (6%). L'Iran redoutant une ingérence soviétique, se rallia au camp occidental et adhéra le 11 octobre 1955 au Pacte de Bagdad.

La société iranienne se transforma profondément, une élite occidentalisée apparut et l'industrialisation vida les campagnes. L'exode rural provoqua, misère et chômage et le mécontentement ne pouvait, en raison de la censure, s'exprimer librement. La grogne se répandit dans les mosquées, parmi les doléances exprimées, le départ du Shah, véritable aubaine pour un certain ayotollah Khomeyni qui aspirait à l'établissement d'une République islamique, et la mise au "rancard" de la laïcisation et de l'occidentalisation du pays. Le Shah opta pour la répression afin de prévenir toute nouvelle insurrection populaire, et procéda à une forte militarisation. En 1978, les soldats refusèrent de tirer sur la population qui manifestait. Le Shah privé du soutien de son armée, s'enfuit aux États-Unis. La République islamique fut proclamée le 1° avril 79. Au mois de novembre, les "étudiants de la révolution" envahissaient l'ambassade des États-Unis à Téhéran, suivie de la crise des otages qui ne prendra fin qu'en janvier 1981. Le Shah considéré comme le fantoche des États-Unis était décédé et le nouveau président Ronald Reagan avait promis de débloquer les avoirs iraniens gelés. L'argent n'a ni morale ni d'amis.

A SUIVRE

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